Sommaire

Résumé

Issu d'un atelier organisé à Tours en 2004, ce numéro de Médiévales (n° 49, automne 2005) est consacré à la mise en place des centres paroissiaux, notamment dans leurs relations avec les territoires (D. Iogna-Prat et É. Zadora-Rio). Sont privilégiées l'étude des structures d'encadrement religieux et celle de l'habitat et de l'occupation du sol. L'hypothèse ancienne de la continuité entre les structures antiques et les paroisses médiévales a été remise en cause : il faut distinguer « d'une part l'ancienneté de l'église paroissiale, d'autre part celle du ressort paroissial » (p. 8).

Attestés au IX^e siècle, les termes de « paroisses » et de « paroissiens » désignent le cadre de vie des fidèles qui vont chercher dans une église précise les sacrements, mais cette notion de territoire est encore floue (M. Lauwers). Loin de reprendre les analyses de la paroisse comme circonscription religieuse issue de l'Empire romain, au moment de sa christianisation, l'accent est mis sur les ruptures et réorganisations de la fin de l'Antiquité. Employé dans le vocabulaire chrétien depuis le IV^e siècle, le mot parochia n'a pas toujours un sens spatial précis, car la paroisse est d'abord l'assemblée des fidèles. Puis, entre le IX^e et le XII^e siècle, les hommes se groupant autour d'un lieu de culte, la paroisse devient une entité territoriale. Le cas anglais montre un système paroissial à direction monastique très différent de la France du sud de la Loire (J. Blair). Après 950, les changements économiques construisent en Angleterre une nouvelle identité paroissiale sous l'impulsion seigneuriale. À Tours se mettent d'abord en place les églises paroissiales, et ensuite les territoires paroissiaux, car les deux ne sont pas à confondre (H. Noizet). Les paroisses tourangelles se multiplient au XII^e siècle, puis la paroisse devient dans la seconde moitié du XIII^e siècle le cadre de référence. La chronologie complexe des paroisses urbaines à Angers et à Clermont pose le problème du caractère paroissial ou non d'une église (F. Comte et E. Grélois). L'urbanisation croissante et les conflits de sépulture forcent notamment à la création de limites paroissiales. « Enterrer un mort, c'était affirmer un droit paroissial sur les lieux où le défunt avait vécu » (p. 69). Dans ce contexte, aucun schéma uniforme ne peut être appliqué.

Les textes normatifs et ecclésiastiques paraissent démontrer clairement l'existence des paroisses, mais l'examen des actes de la pratique, comme dans le bas Quercy, montre leur absence dans les chartes (F. Hautefeuille). Plusieurs types de paroisses apparaissent dans la seconde moitié du Moyen Âge, car tous les bénéfices ne forment pas des entités paroissiales. Trois facteurs au moins expliquent cette diversité : les causes géographiques, le poids du passé et le contexte au moment de la formation. Les territoires agraires n'offrent pas non plus d'adéquation complète avec les paroisses rurales (S. Leturcq). Les terroirs ont leur propre cohérence, fondée sur des besoins agricoles, alors que la paroisse repose sur des intérêts religieux (communauté de prière) et fiscaux (la dîme). Une même paroisse peut regrouper plusieurs communautés agraires, être divisée entre différents territoires, ou recouvrir un ensemble homogène. La longue élaboration du réseau paroissial, qui se retrouve aujourd'hui dans les communes avec de nombreuses modifications, est le premier maillage administratif à l'échelon local (É. Zadora-Rio). Les paroisses n'ont pas été formées suivant les mêmes modèles, soit que la paroisse résulte d'un acte de fondation, soit qu'elle soit la conséquence de l'extension à partir d'un pôle ecclésial. Nombreux sont les lieux de culte intermédiaires (chapelles ou oratoires) qui exercent une partie des droits paroissiaux. Les limites des paroisses sont issues d'un travail lent, sans le caractère intangible souvent mis en avant.

Points forts

• Un volume à la pointe de l'historiographie, réunissant des études de cas et des tentatives de synthèse.

• Une analyse à différentes échelles, incluant des exemples locaux urbains et des zones larges englobant plusieurs pays, avec des paroisses rurales et urbaines.

• Une approche nuancée de la genèse des paroisses, loin des simplifications, intégrant les apports des concepts géographiques.

B.M.